On laisse souvent entendre que telle oeuvre d’art, majeure, a « choqué » en son temps. Notamment à partir du 19ème siècle : on aime imaginer ces hommes et femmes de la bonne société, se jeter hors des salons et des expositions, horrifiés, s’arracher la barbe pour les uns, les froufrous pour les autres, réclamer le bûcher pour l’hérétique…
Je crains que la réalité soit plus fade, et que ces oeuvres qui ont choqué, aient en réalité fait doucement rigoler. Avec un rictus de mépris, on a dû se dire que ce Gustave Courbet n’était décidément pas très subtil. Ou encore on a soupiré de dépit devant les gribouillages d’enfant demeuré de ces « fauves ». Et aujourd’hui on apprend que tel Jeff Koons fait scandale avec son zob en plastique, mais qui est vraiment offusqué ? Personne. C’est simplement une expression journalistique.
C’est une tendance assez récente de prendre l’art au sérieux, de croire qu’il peut changer le monde, d’oublier qu’un tableau n’est tout de même qu’une image, ou qu’une musique n’est qu’une musique par rapport à la vraie vie des gens. Ceux qui surestiment le caractère scandaleux de l’art sont en général non pas les artistes eux-mêmes, mais les salariés de l’art et la culture : enseignants, journalistes, critiques, guides de musée, galeristes… Ceux-là font grand cas des « ruptures » et des « coups de pied dans la fourmilière », ils enseignent une opposition entre art et conservatisme.
Il est pourtant évident que, dans l’art et dans la vie elle-même, la rupture a un rôle relativement mince et parcimonieux par rapport à la conservation. La société est comme n’importe quel organisme : elle s’entretient avant tout, et ne se révolutionne qu’en dernier recours, lorsque les forces conservatrices sont épuisées ou lorsque l’harmonie et la conservation deviennent plus coûteuses à maintenir que la reconstruction elle-même.
Un peu d’humour sur les « salariés de l’art et la culture » :
Un article intéressant qui donne un aperçu de l’opinion publique de l’art contemporain : http://latribunelibredefranckgintrand.wordpress.com/2009/10/07/art-contemporain-ce-qui-ne-passe-decidement-pas/
C’est d’autant plus vrai qu’il n’y a pas à mettre de barrière formelle et intangible, morale, religieuse, politique, toujours subjective,avant de « faire juger » une oeuvre d’art par les « masses spectatrices »: Picasso n’a-t-il pas dit: « L’Art n’est pas chaste, s’il devient chaste, alors ce n’est plus de l’art »…perso, je leur préfère la sagesse d’un Bernanos »Laissez-moi donc juger de ce qui m’aide à vivre… » car l’Art peut aussi être une excellente thérapie, ne coûtant rien à la Sécu !!
A l’heure de l’épilation générale et obligatoire du sexe féminin, l’Origine du Monde, à nouveau, choque. Moi, j’adore!