Couple impossible

Dieu sait que l’amour est indulgent avec les hommes, il s’accommode des « grands écarts » entre :

  • un homme laid et une femme sublime,
  • un vieux briscard et une petite jeunette,
  • un bon vivant ventripotent et une sportive chevronnée,
  • un type fauché et une bourgeoise…

En revanche je suis formel (je viens d’en croiser un) : il ne peut pas fonctionner de couple où la femme a une trop grande différence de grandeur avec l’homme.

C’est rédhibitoire. Quel que soit l’amour que ces gens se portent, leurs qualités réciproques, leur histoire… L’un à côté de l’autre, ils donnent à voir un spectacle simplement trop croquignol pour que l’entourage, ou le miroir, leur renvoie autre chose qu’une image négative ou comique. Image qui lentement et sûrement, vient à bout de leur union un de ces jours.

Comment en serait-il autrement ? Comment l’homme de ce couple n’en arriverait pas, au gré des regards fugitifs et narquois, à développer naturellement une rancune envers sa femme ? Ou à se vexer à force qu’on ne prenne jamais son duo au sérieux ? Comment ne finirait-il pas par prendre ombrage du fait que le monde persiste à voir, là où il manifeste sa passion et sa virilité, l’image d’un petit garçon donnant la main à sa grande sœur, ou tendant le front à maman pour recevoir un baiser ?

Et par « grandeur », je ne parle pas seulement de taille : plus généralement, l’amour ne s’accommode pas d’une trop grande différence d’allure et de prestance. Il n’y a qu’à se rappeler cette fête, que nous avons essentiellement passée désolé, à regarder cette fille élégante et distinguée à l’autre bout de la pièce, tenir à son bras une loque à casquette sans style ni tenue… Spectacle aussi désolant que celui d’un âne saillant une jument : le fruit de l’union sera peut-être plus tard un mulet robuste et vaillant ; en attendant la scène est, le temps de son accomplissement, exclusivement bouffonne, disgrâcieuse et grotesque.