D’un côté, on nous invite à chaque coin de rue à nous épanouir, nous affirmer, exprimer notre unicité d’individu… Par la création et la consommation, se démarquer, laisser un souvenir, marquer les esprits, être célèbre un quart d’heure ou deux, donner son avis, participer, s’habiller pas comme les autres, assumer sa différence et son originalité…
De l’autre côté, nous sommes priés de gommer notre empreinte, de ne pas laisser trace de notre passage. Laisser la planète dans l’état où nous l’avons trouvée. Se faire petit. Pour chacun de nos gestes, chacune de nos actions, chacune de nos respirations, on nous présente la facture de ce que nous coûtons en fait de défiguration de l’environnement et de dégâts sur la couche d’ozone.
Marquez votre empreinte, mais à l’encre effaçable. Des traces oui, mais sur le sable. A la limite faites-vous tatouer une fée au bas des reins : affirmez-vous par le lifestyle, les choix de vie, les produits… Démarquez-vous au sein de votre cercle d’amis, tant que vous voulez ! Mais de grâce, pas de construction en dur. Pas de traînée indélébile. Pas de geste trop grandiose apte à rester dans les mémoires. Que du recyclable, et de l’incinéré. Vous coûtez suffisamment à la Terre en eau et en air pour ne pas les consommer en vain !
Cet état d’esprit, fort heureusement, n’est pas ce qui a toujours régné. Il y a eu des hommes, comme Gustave Eiffel, pour ne pas se soucier de leur empreinte écologique. Ou alors pour la faire la plus grasse possible : une grosse trace de doigts au milieu de la gueule de Paris.