L’ermite ne croit pas qu’un philosophe ait jamais exprimé ses opinions véritables et ultimes dans des livres : n’écrit-on pas des livres précisément pour cacher ce que l’on porte en soi ? Il doutera même qu’un philosophe puisse avoir de manière générale des opinions « ultimes et véritables », qu’il n’y ait pas de toute nécessité en lui, derrière toute caverne une autre caverne plus profonde. Un arrière-fond d’abîme derrière toute « fondation ». Toute philosophie est une philosophie de surface : il y a de l’arbitraire dans le fait qu’il se soit arrêté ici, ait regardé en arrière et alentour, qu’il n’ait pas creusé plus profondément ici et ait remisé sa bêche, il y a aussi de la méfiance là-dedans. Toute philosophie cache une philosophie ; toute opinion est aussi une cachette, toute parole est aussi un masque.
Nietzsche, dans je-ne-sais-vraiment-plus-quel livre.