« Ce monde-là est mort »

– Les valeurs et les hommes pour lesquels nous avions prêté serment n’existent plus, dit l’hôte sur un ton très grave, en levant lui aussi son verre. Tous sont morts ou partis, ils ont renoncé à ce que nous avions juré de défendre. Il existait autrefois un ordre mondial pour lequel il valait la peine de consacrer sa vie ou de mourir. Ce monde-là est mort. Avec l’ordre nouveau, je n’ai rien de commun. C’est tout ce que j’ai à dire à ce sujet.

– Pour moi, le monde d’autrefois reste vivant, même si en apparence il a disparu. Il vit, parce que je lui ai prêté serment de fidélité. Pour moi, c’est tout ce qu’il y a à dire à ce sujet, dit le général.

 

Sandor Marai dans Les Braises.

« On se vole soi-même »

« Dès la seconde fois où je t’ai vu, j’ai compris ce que j’avais lu dans les livres mais que je n’avais jamais vraiment cru : que l’amour et la souffrance sont une seule et même chose, et que la valeur de l’amour est la somme de ce qu’il faut sacrifier pour le connaître ; et chaque fois qu’on l’obtient à bon compte on se vole soi-même ».

William Faulkner dans Les palmiers sauvages.

Etats d’âme


Il y a comme ça des pays qui bénéficient d’emblée un a priori spirituel positif, et qui font « grandir l’âme » sans qu’on sache trop comment :

  • Le Maroc fait grandir l’âme, avec ses habitants si chaleureux, main sur le cœur, pétris de simplicité et de sagesse.
  • Le Brésil fait grandir l’âme de la convivialité, des sifflets de carnaval et du football festif.
  • Le Royaume-Uni fait grandir l’âme excentrique de l’ivrognerie sympathique et du pop-rock.
  • L’Ethiopie vert-jaune-rouge, sans avoir rien fait pour cela, fait grandir l’âme de la coolitude et de la fraternité…

La France, quant à elle, serait bien en mal de faire grandir quoi que ce soit. Ses poètes, ses grands hommes et son histoire ne suffisent pas : on la somme de faire ses preuves, de présenter ses états de service, et c’est tout juste si on l’autorise à se demander ce qui fait son âme et à quoi celle-ci peut ressembler.

Eh bien moi je vous le dis : il y a des pays qui font grandir l’âne !