Contre les jeux de mots des affiches de films d’animation

Depuis qu’on ne fait plus les dessins animés pour les enfants mais pour leurs parents attardés, une règle s’est faite jour : l’affiche doit comporter un gros jeu de mots à 2 balles (pour attirer les jeunes parents décalés amateurs d’humour à la sauce Canal+).

Il n’y a pas un film d’animation – pas un – qui échappe à la règle :

« Même les petits poissons ont de gros sushis » ! Sushi/Souci : très bon !

Personne mais on n’allait pas laisser passer ce bon jeu de mots !


Flammes/Chaud… Ah oui d’accord ! TRES bon ! TRES TRES bon !

Vous voyez le truc ? LOL !

« La CROQUETTE de l’Ouest » au lieu de la « CONQUETE » !
Parce que le mec c’est un chien tu vois ! Pfffrrr !

Et le trio gagnant :

… vous êtes encore là ?

Ce qui est remarquable, c’est le systématisme. Il n’y a pas de hasard : sur ces grosses productions, si le petit jeu de mots est là c’est le fruit d’une stratégie.
Il y a dû y avoir, une fois, un type qui a sorti une bonne vanne pour Nemo, on a trouvé ça drôle alors on l’a mis sur l’affiche. Pour le suivant, on a voulu faire encore mieux : plus drôle, plus déjanté. Il y a eu surenchère. A la longue on n’a plus su pourquoi mais c’est devenu obligatoire : il fallait un jeu de mots sur l’affiche, pas forcément drôle mais un jeu de mots.

Aujourd’hui, pour chaque film, il y a une équipe de promotion qui planche sur ce jeu de mots. On ne peut pas sortir le film avant d’avoir trouvé la vanne de l’affiche. Il faut imaginer des gens qui se réunissent dans des bureaux pour y réfléchir. Un jeu de mots. Pas forcément drôle, juste que ce soit un jeu de mots : 

– Qu’est-ce que vous proposez pour l’affiche du film « Robots » ? 
– « Métro-boulon-dodo » ? « Boulon » parce que comme ce sont des robots tu vois…

Et toute l’équipe garde son sérieux, ajuste ses lunettes et regarde le chef de projet noter l’idée sur le paperboard. Ils ne savent plus pourquoi au juste ils cherchent un jeu de mots, et savent encore moins qu’ils font peut-être du mal au film en faisant ça : peut-être que de plus en plus de gens, irrités, consternés, tournent les talons quand ils voient quelque chose comme « Même les petits poissons ont de gros sushis ». Prennent les jambes à leur cou.

8 réflexions au sujet de “Contre les jeux de mots des affiches de films d’animation”

  1. Oui Calmez vous, les taglines pourries déservent souvent les films et émanent des distributeurs, pas des auteurs.
    Et elles ne sont surtout pas inhérente au cinéma d’animation, on en retrouve partout et qui ne sont pas beaucoup plus inspirés que celles que vous prenez pour cible.

    1. J’imagine bien que ceci vient du distributeur, encore que j’ai pu constater dans mes recherches d’images pour cet article que l’affiche « VO » a son équivalent : j’imagine donc que le distributeur adapte le jeu de mots que Disney ou autre fournit.
      C’est vrai que ces « taglines », puisque ça s’appelle ainsi, existent sur toute affiche cinématographique, mais reconnaissez que le film d’animation se spécialise dans une forme très précise : le jeu de mots, de plus ou moins bonne facture mais jeu de mots. On pourrait imaginer une phrase comique ou mignonne qui ne soit pas un jeu de mots, ou pas de tagline du tout. Mais non.

  2. J’avais pas remarqué…
    Sans doute parce que je ne fais pas gaffe à ces affiches.
    Je pense que depuis quelques années je ne les regarde plus parce qu’elles me fatiguent les yeux et l’esprit. Parce qu’elles orientent mes pensées vers des trucs trop bas, ou trop loin de ce qui compte vraiment.
    Et là, quand je vois çà, çà me désespère : s’il y a offre, c’est qu’il y a demande. Ces affiches (et bien d’autres) correspondent à une demande, une vraie, réelle.
    Il y a une relation entre ceux qui produisent et ceux qui consomment. Et ces affiches sont des preuves de l’existence de cette relation : elles sont des lettres d’amour aux consommateurs.
    C’est beau l’amour.
    Mais je me sens pas concernée par ce type d’amour.

  3. Il y a demande de dessins animés, et notamment de dessins animés qui ne soient plus seulement des contes pour enfants mais qui incluent de l’humour décalé, des références et des clins d’œil à la génération adulte qui emmène les enfants au ciné… Mais y a-t-il demande de jeux de mots sur l’affiche ? J’ai l’impression justement que le fleurissement du jeu de mots provient d’une déconnexion entre offre et demande : là où l’offre devrait se demander pour chaque film quelle affiche représente le mieux l’histoire et attirera les gens, il s’est installé un automatisme. On ne cherche pas à travailler la meilleure affiche, mais on se lance directement dans la recherche d’un jeu de mots absurde. C’est une sorte de « cliché », tout comme à une certaine époque, les films Disney incluaient forcément aux côtés du méchant un petit personnage braillard et agité. Par automatisme, « parce que c’est toujours comme ça ».
    @Patrick : TRES bon. TRES TRES bon !

  4. (…cherche un autre compliment que « bien vu » pour ne pas dire comme Patrick..)
    Ah je l’ai : « finement observé » !
    Ceci me fait d’ailleurs penser à une vidéo que m’avait envoyé le susnommé Patrick sur le côté systématique des problèmes de réseau de téléphone portable dans les films d’horreur.
    Il faut croire que tous les types films ont leurs passages obligés, ça doit aider pour les pannes d’inspiration…
    D’ailleurs, un bestof des tagline de films d’horreur doit donner un truc bien marrant aussi

  5. L’atrocité de ces affiches…le mot laideur est presque convenu, faible, face à ces « machins »…
    à quand une ‘brigade carrément anti pub » pour les faire disparaitre des murs et couloirs de métro?

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